Bill Buford : la naissance d'un chef (2024)

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Boudin noir et côtes-du-rhône La bûche de Noël, un dessert français qui s’exporte Isaac Toups partage la recette de ses crevettes pompettes La révolution des French pancakes Comment reconnaître une bonne baguette Laëtitia Rouabah : une French cheffe chez Ducasse à New York L’interdiction du foie gras entre en vigueur en Californie La quiche, emblème gourmand de la Lorraine « Vous n’avez pas besoin d’en savoir beaucoup sur le vin pour l’apprécier ! » La révolution par le (sous) vide Le premier «diner» américain de Paris La quiche, emblème gourmand de la Lorraine Comment reconnaître une bonne baguette Breizh Café, la crêpe aux influences plurielles Essor, chute et résurgence des bouillons La révolution française du café Thierry Rautureau, des fourneaux aux plateaux de télévision La chartreuse, victime de son succès aux Etats-Unis King Cake : une tradition louisianaise d’origine française Petite histoire franco-américaine de la crème glacée Bill Buford : la naissance d’un chef Le Montcalm, un croiseur français en face d’Omaha Beach Café Joyeux, l’inclusion dans la joie Qui sera le nouvel arsenal de la démocratie ? En France, les planètes s’alignent pour la littérature québécoise Albert Camus : reconstruire la France depuis l’Amérique Les nuits blanches de Jean-Marie Périer Le rêve américain d’un libraire en série Pourboire ou pas pourboire ? « Français de papier » ou « Français de souche » ? Molière est mort, mais sa langue est bien vivante References

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Un Américain rêve de percer le secret de la cuisine française et part vivre à Paris pendant trois mois. Le scénario est connu. Le denier livre de Bill Buford aurait pu retomber comme un soufflé de clichés, mais le journaliste, fin cuisinier, sauve adroitement le repas. Il passera finalement cinq ans à Lyon. Au fil des rencontres et des embûches, tantôt reportage, tantôt recueil d’anecdotes cocasses, Dirt – récemment traduit en français – se lit comme l’initiation d’un chef amateur.

Par Clément Thiery

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© Jean-Yves Lemoigne

Une ratatouille, un soufflé aux trois fromages, des tuiles de pommes de terre et des crabes farcis. Voici quelques-uns des plats que Bill Buford a appris à cuisiner chez Citronelle, le restaurant le plus en vue de Washington. (L’établissement a fermé ses portes en 2012.) L’apprenti cuisinier a passé huit mois en compagnie du chef français Michel Richard, multipliant les voyages en train depuis New York, jusqu’à atteindre le poste de poissonnier dans sa brigade. Mais ce n’était pas assez.

Admiratif des cuisiniers américains qui ont fait leurs classes à Paris – comme Dan Barber, élu meilleur chef des Etats-Unis en 2009 –, Bill Buford décide de poursuivre son apprentissage gastronomique en France. « C’est une éducation, raffinée pendant plus de 300 ans, permettant de cuisiner tous les ingrédients du répertoire français », explique Bill Buford. (Il était en train de réduire un fond de veau pour accompagner un plat d’agneau lorsque notre appel l’a interrompu.) « C’est apprendre les cent manières de cuisiner une pomme de terre ; c’est découvrir un nouveau langage, une discipline, une rigueur. »

Ce n’est pas la première fois que Bill Buford se prend de passion pour une culture étrangère. Le journaliste a suivi pendant six ans des hooligans (et s’est fait tabasser par la police) pour son livre Among the Thugs (traduit en français par Parmi les hooligans). Quelques années plus tard, il quittait son poste d’éditeur au New Yorker pour rejoindre l’équipe du chef italo-américain Mario Batali à Manhattan. Une première expérience en cuisine qui donna naissance au livre Heat (Chaud brûlant).

Boudin noir et côtes-du-rhône

C’est le chef français Daniel Boulud, propriétaire de sept restaurants à New York, qui conseille à Bill Buford de s’installer avec femme et enfants à Lyon, la « capitale mondiale de la gastronomie ». Il aidera même la famille à obtenir un visa. Mais les débuts en France sont difficiles… Aucun restaurateur ne veut embaucher un Américain sans formation. Pas du genre à renoncer, le journaliste se lie avec un boulanger qui l’initie à l’alchimie du pain et aux coutumes locales. Il assiste à une « tuaille » et, entre deux verres de côtes-du-rhône, apprend à transformer en boudin noir le sang du cochon fraîchement égorgé.

Mais pour entrer dans la confrérie des chefs, Bill Buford doit s’inscrire dans une école hôtelière. A Lyon, son choix se porte naturellement sur l’Institut Paul Bocuse : là, il apprendra à casser un œuf (sur une surface plate ; jamais sur le bord de la poêle !), à tendre l’oreille pour écouter le « chant du beurre » et à dresser une assiette selon trois principes : la couleur, la dimension et la texture. L’apprenti s’en sortira avec la note de 11/20. Et sera finalement embauché chez la Mère Brazier, un bouchon traditionnel fondé en 1921 et décoré de deux étoiles Michelin. Une institution lyonnaise !

D’abord assigné au garde-manger comme responsable des entrées, des viandes et des charcuteries, Bill Buford finira chef de partie, un poste à responsabilité. De retour à New York, il signe une série d’essais pour le livre somme de Daniel Boulud, Daniel: My French Cuisine, et recrée avec lui vingt plats anciens dont le turbot soufflé, le jambon au foin et le canard à la presse. Il écrit depuis peu une chronique gastronomique pour le New Yorker, « Kitchen Notes », qu’il décline – avec l’aide de ses deux fils – sous la forme de vidéos pratiques.Le journaliste est devenu gourmet ; le chef amateur a gagné en confiance. « La cuisine française, qui avant mon séjour en France me semblait incompréhensible et menaçante », dit-il, « est devenue libératrice et excitante ».

Bill Buford : la naissance d'un chef (1)

A la française, ou les aventures lyonnaises d’un Américain, apprenti cuisinier et père de famille, à la recherche des secrets de la gastronomie de Bill Buford, traduit de l’anglais par Olivier Deparis, Editions de l’Olivier, 2021.


Article publié dans le numéro d’août 2020 de France-Amérique.S’abonner au magazine.

Clément Thiery

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